Peintures sculptures 1990-2000, 2000

Ce catalogue a été publié à l’occasion de l’exposition Philippe Richard - Peter Soriano, peintures - sculptures (1990-2000), au musée des Beaux-arts de Tourcoing, du 17 juin au 2 octobre 2000.

Directeur de la publication : Evelyne-Dorothée Allemant
Auteur : Tristan Trémeau
Traduction de l’entretien avec Peter Soriano : Michèle Martel
Crédits photographiques : Florian Kleinefenn (couverture, vues de l’exposition à Tourcoing), Marc Plantec, Laurent Arahuin, Hans-Peter Szyska, Denis Cowley, James Die, John Lamka, Jean Christophe Lett, Anders Norrsell
Conception graphique : Jean-Etienne Grislain
Photogravure : La Cité Numérique
Imprimerie : 4M Impressions

ISBN 2-901440-13-14




Tristan Trémeau : Depuis ta résidence en Islande en 1995 et les bois flottés peints, tu as commencé de développer un travail pictural dans l'espace sur les volumes, des structures transparentes, voire directement sur le mur de Kiel. Tes derniers tableaux sont articulés en polyptiques, comme si ta pratique tendait à rencontrer des instances sculpturales, voire architecturales. Qu'en est-il pour toi de ces rapports avec de nouveaux supports volumétriques?



Philippe Richard : Le travail sur les bois flottés a d'abord été un "accident" en ce sens que si je n'étais pas venu en Islande peindre pendant sept mois, en hiver, je n'aurais jamais entrepris un tel projet et il n'y aurait eu aucune conséquence sur mon travail, à savoir le début de cette réflexion sur ce que serait une peinture dont on percevrait pas la surface dans son immédiateté. Lorsque j'ai récupèré les bois flottés, j'ai tout de suite eu conscience de leur présence, une présence réelle qui est différente de celle d'un chassis ordinaire dont on pourrait dire qu'il est, lui, un objet anonyme. Ces bois flottés avaient une présence de par leur histoire, et pendant longtemps je n'ai pas pu les peindre parce que je me demandais : comment les peindre, comment ajouter autre chose qui en fasse un autre objet, qui le transforme sans qu'il le rende moins présent, mais au contraire qui lui ajoute une autre présence ? Et j'ai conscience de ce problème là à chaque fois que je réalise une structure dans l'espace. Si la structure est plus forte que la peinture, ça ne marche pas car cela deviendrait juste une oeuvre minimaliste recouverte de peinture. J'aime les polyptiques gothiques où la peinture est toujours plus forte que l'objet, même si l'objet par lui-même impose une certaine structure dans la composition de la peinture. Cette réflexion directement issue d'une observation des bois flottés s'est trouvée radicalisée avec les parallélépipèdes, volumes aux formes banales plus proches de l'esprit du tableau, sortes de polyptiques à cinq ou six faces faisant appel à la mémoire pour être perçus dans leur globalité. Je recherche la même chose dans ce que j'appelle les Variables Atmosphériques qui ont pour structure de base un chassis les apparentant aux paravents : comment, à partir de la contrainte donnée d'un objet transparent et modulable, créer une peinture qui devienne réellement une peinture et non une structure modulable peinte. Le travail autour des trois peintures nommées Le bord du monde n'existe pas est un peu différent. Les contraintes étaient multiples. Comment créer une structure modulable de huit panneaux dont tous les bords sans exception seraient reliés à tpous les autres par au moins un élément pictural, chaque bord nous renvoyant systématiquement au centre ou plutôt vers un centre, rendant caduque l’idée même de bord.